Le syndrome de l'imposteur. (thème imposé. 400-800 mots)
Une lutte sans fin...
Les pieds embourbés me soutiennent encore. Les jambes flageolent, mais je ne tangue pas. Je reste immobile, le regard arrimé au futur inconnu, et je m’en effraie !
Le sol se lézarde…
Depuis que j’écris, un abîme vertigineux se dessine sous mes pieds… Parfois je m’y perds aspirée, parfois je ferme les yeux et résiste.
Il se tapit pourtant je le sais, avale les compliments, ma confiance retrouvée et ma joie… Il me connaît par cœur et en douce, attaque sournoisement mes failles.
« Patience » se délecte-t-il…
Jusqu’à ce jour…
Mes mots couchés sur une feuille de papier, relus à haute voix et corrigés tournent aigres, s’alourdissent, les incohérences se dévoilent, les règles de grammaire et le vocabulaire écarquillent les yeux et se gaussent !
Les phrases, le sens et la profondeur de mon histoire s’évaporent en un éclair ! Que reste-t-il à part les doutes qui s’amplifient et me submergent !
Comment survivre alors que la certitude de mal raconter noue les tripes ? Je baisse la tête, courbe l’échine, évite le coup fatal au menton. Mais il persiste et me projette contre le mur malgré moi !
J’en tremble, suffoque presque. Rougis assurément de honte…
Les compliments toquent timidement et brandissent leurs boucliers réconfortants mais terriblement inefficaces à poursuivre la lutte. Ils ne me mèneront pas cette fois à la victoire, je le crains…
Le manque de confiance féroce m’assaille, me dévore sans pitié jusqu’à ce que je succombe.
Pourquoi ? Une question de caractère ? Une mésestime de soi ? Une flagellation inconsciente ?
À la recherche d’une légitimité, je m’épuise et me fane.
Je participais à des cours de rattrapage en lecture silencieuse au collège, préfère absorber des films… Je ne possède aucune culture littéraire et surtout… Mon regard se détourne… Je ne lis pas.
Pourquoi serais-je apte à écrire !
Ce secret, gardé bien au chaud de mon ventre durant de très nombreuses années, je vous l’offre. Les bras tendus vers vous, je me mets à nu, et en appelle à vos cordages, bouées et canots de sauvetage !
Je respire cependant encore…
Les pieds embourbés me soutiennent… Je me débats, me raccroche à ce premier contrat d’édition reçu.
Je respire, m’agite. Un sourire déchire mon visage. Mais ma tête se secoue…
J’ai cru que ce précipice immense s’amenuiserait grâce à un gribouillis apposé au bas d’une feuille !
Quelle ironie amère !
Leurre, faux-semblant de valeur !
Bon sang ! Ce syndrome de l’imposteur disparaîtra-t-il définitivement un jour !
Marina CARRIEU